C'est bien la première fois que je pars aussi longtemps en "voyage". Six mois et une poignée de jours. Et puis, c'est un peu plus (ou un peu moins?) qu'un voyage, cette expérience de quatre mois dans une école américaine. L'explication vient peut-être de là.
Je ne suis pas étranger au phénomène que j'appellerai 'l'Absence'. Vous connaissez sans doute, je m'explique: lorsque l'on s'éloigne de son foyer, les derniers jours avant le retour sont caractéristiques d'un sentiment de non-appartenance de l'endroit que l'on quitte, comme l'endroit que l'on va retrouver. Un peu comme si j'étais déjà dans la file d'attente à l'aéroport (et Obama sait qu'elle est longue, l'attente!). Le corps est toujours présent, paraît-il, mais l'esprit est déjà tout tourné vers les souvenirs que l'on va retrouver. Cette séparation entraîne un détachement du quotidien, aussi bien sur le plan spatial que temporel. Regarder par le hublot, en quelque sorte, comme perdu entre deux eaux. Mais je dis perdu, alors que je pense le contraire. Ce serait plutôt le moment décisif du voyage, que j'appréhende, redoute, puis déguste, jouissif, l'Absence.
Or comme je le disais, je ne suis jamais éloigné aussi longtemps, et aussi loin. Lors de mes précédents voyages, l'Absence se résumait à quelques heures, lorsque l'on fait son sac, ou quelques jours, le temps de dire au revoir aux nouvelles (ou anciennes) connaissances. Quelle étrange chose donc que ce qui m'arrive ici, cette Absence déjà présente deux voir trois semaines avant l'embarquement vers des terres plus familières.
Nul doute que des marqueurs temporels tels que la fin du semestre scolaire, le début du grand froid hivernal, l'approche des festivités de fin d'année, y sont pour beaucoup. Et puis, le fait de repartir à l'aventure, de me remettre en mouvement pour les deux semaines qu'il me reste (Boston - Montréal - Boston - New York - Boston) sert de tremplin pour cette Absence difficilement descriptible.
Alors je commence à faire mon sac, à trier les affaires, à faire mes adieux. Et je savoure cette Absence spatiotemporelle que seul le voyage dans le temps et la distance peut m'offrir.
Je pars rentrer.
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Titre en hommage au film de Todd Haynes:
http://www.imdb.com/title/tt0368794/
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